FED : l’épreuve de la normalisation de sa politique monétaire

Il y a neuf ans, en juin 2006, on assistait à la dernière augmentation du taux directeur de la Réserve fédérale américaine. Depuis une crise sans précédent a poussé l’économie mondiale dans ses retranchements et c’est par la mise en place de politique monétaire non conventionnelle que les différentes banques centrales sont parvenues à maintenir le système à flot.

Avec l’amélioration des conditions économiques aux États-Unis, les différents acteurs anticipent une augmentation des taux directeurs et chaque réunion de la FED donne lieu à des discussions où chacun avance des arguments en faveur ou en défaveur de celle-ci. Même si les médias et certains commentaires laissent à penser que la normalisation de la politique monétaire est une formalité, en réalité nous allons surement assister à l’une des plus grandes expériences jamais menées en terme de politique monétaire.

LE PROCESSUS D’AUGMENTATION DU FED FUNDS PAR LA FED

Il y a maintenant un an, tous les participants au FOMC1, à part un (c’est peut-être le même qui souhaite voir des taux négatifs pour 2015 et 20162), se sont mis d’accord sur la procédure à suivre pour atteindre l’objectif de normalisation de la politique monétaire.

  1. Lorsque les conditions et les perspectives économiques se seront améliorées, la politique monétaire sera rendue moins accommodante. Pour cela, on devrait assister à une augmentation progressive des fonds fédéraux (taux directeur). Concrètement, une fourchette large de 25 points de base incluant le taux ciblé sera fixée.
  2. La FED va tout d’abord se concentrer sur le taux de la facilité de dépôt (IOER), c’est-à-dire le taux auquel sont rémunérés les dépôts que placent les banques et autres établissements financiers auprès de la banque centrale. Celui-ci sera fixé pour qu’il corresponde à la borne supérieure de la fourchette cible. Autrement dit, le taux directeur effectif ne sera pas en mesure de dépasser ce seuil.
  3. Pour faciliter la normalisation, les opérations de mise en pension (overnight reverse repo) récemment introduites  seront utilisées temporairement et de manière transitoire. Ces opérations seront utilisées de manière à ce que le taux associé soit égale à la borne inférieure de la fourchette cible.
  4. Lorsque la phase d’augmentation du taux directeur aura débuté, le comité a l’intention de réduire le portefeuille de titres de la Réserve fédérale d’une manière graduelle et prévisible en cessant de réinvestir les remboursements du principal sur de nouveaux titres. Mais encore une fois, cela dépendra très fortement des conditions économiques et financièresÀ court terme, il n’est pas envisagé de recourir à la vente de MBS3, mais le comité ne s’interdit pas de le faire à plus long terme, de manière à éliminer la participation résiduelle.

LES OUTILS À LA DISPOSITION DE LA FED

Le taux d’intérêt sur les réserves excédentaires (IOER) : Son augmentation va stimuler l’arbitrage sur le marché. Ainsi les banques vont être incitées à emprunter sur le marché à un taux inférieur au taux IOER et à ensuite placer les réserves auprès de la FED pour empocher la différence. De cette manière, le taux des fonds fédéraux va converger vers le taux IOER et dans le même temps, la quantité de réserve disponible sur le marché va diminuer.

Overnight reverse repurchase agreement facility (ON RRPs) : Une liste élargie de participants4 permets à la Fed d’étendre son champ d’influence et d’être plus à même d’agir sur les taux des marchés monétaires (taux de court terme).

Term RRPs : Cet outil est identique au programme ON RRPs, mais permet de drainer les réserves du système bancaire pour une période de temps plus longue.

Facilité de dépôt à terme (Term Deposit Facility) : Lorsque des fonds sont placés sur la facilité de dépôt à terme, ceux-ci sont retirés du solde des réserves pendant la durée de vie du dépôt à terme, cela permet donc de réduire l’abondance de réserve disponible.

Réduire la quantité de titres détenus : En l’absence de réinvestissement du principal dans de nouveaux titres le portefeuille de titres détenus devrait diminuer de près de 700 milliards d’ici à deux ans (à mettre en perspective avec la taille du bilan de la FED qui est d’environ 4500 milliards de dollars et des 4200 milliards de titres qu’elle détient).

Les réserves obligatoires : Cet outil n’est pas utilisé de manière active pour l’implémentation de la politique monétaire (il reste inchangé depuis 1992), mais c’est une option disponible qui peut permettre d’augmenter la rareté des réserves excédentaires.

Source : federalreserve.gov | Photos : User: AgnosticPreachersKid / Wikimedia Commons / CC-BY-SA-3.0

NOTE : 
(1) FOMC = Federal Open Market Committee
(2) voir Figure 2
(3) MBS = Mortgage-Backed Security.
(4) Deux douzaines de banques et des institutions non bancaires