Comment l’UE et le marché unique va nous permettre de faire des économies

En 1957, la signature du traité de Rome lance un projet ambitieux : créer un marché intérieur européen. Ce marché, parfois appelé « marché unique », regroupe les anciens marchés nationaux des États membres de l’Union européenne.

L’objectif est double : stimuler l’économie des pays membres tout en rapprochant les peuples par les échanges. Pour y parvenir, les Européens s’attèlent à supprimer progressivement toutes les barrières à la libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes.

Une construction progressive

Dès 1968, dix ans après l’entrée en vigueur du traité de Rome, les droits de douane entre pays de la CEE sont supprimés. Un tarif douanier commun est également instauré à l’égard des pays tiers, accompagné d’une politique commerciale commune.

Ce processus de construction du marché unique se poursuit encore aujourd’hui. Récemment, la Commission européenne a fait du marché numérique l’une de ses dix priorités. Elle œuvre à lever les dernières barrières, notamment en luttant contre les discriminations tarifaires entre consommateurs européens selon leur pays d’origine.

Un peu de théorie : qu’est-ce que la discrimination par les prix ?

En économie, on parle de discrimination par les prix lorsqu’un même bien est vendu à des tarifs différents selon l’acheteur ou la quantité achetée.

Arthur Pigou (1920) a classé ces pratiques en trois catégories :

  • La discrimination de premier degré : le vendeur adapte le prix à chaque client en fonction du maximum que celui-ci est prêt à payer. C’est la discrimination “parfaite”, rare car elle suppose une connaissance fine de chaque acheteur.
  • La discrimination de second degré : le prix varie en fonction de la quantité achetée, sans distinction entre les clients (par exemple, les ventes en lots).
  • La discrimination du troisième degré : le prix dépend du type de client (par exemple, les réductions étudiantes).

Ce type de discrimination est surtout observé en situation de concurrence imparfaite (monopole ou oligopole). Elle permet aux vendeurs de capter davantage de clients en ajustant les prix à la capacité de paiement de chacun, augmentant ainsi le bien-être total par rapport à une situation où certains consommateurs seraient exclus.

Pour que cette pratique fonctionne, il faut cependant que la revente du produit soit impossible et qu’il n’existe pas d’arbitrage entre clients.

Pour reformuler si le prix est bas, un nombre plus important de consommateur va être en mesure d’acquérir le bien et le bien être totale va être plus important.


Le marché unique numérique : des promesses encore inachevées

Le marché unique européen vise à offrir aux entreprises un espace élargi pour développer leur activité grâce aux économies d’échelle, tout en renforçant la concurrence au bénéfice des consommateurs : plus de choix, et des prix plus bas.

Si la suppression des barrières douanières, des quotas, et l’introduction de l’euro ont été des étapes majeures, des défis persistent.

L’euro a certes facilité la comparaison des prix au sein de l’Union, mais les coûts de transaction (transport, logistique) restent souvent trop élevés pour encourager un arbitrage efficace entre pays, en particulier en dehors des zones frontalières.

Le marché numérique européen rencontre les mêmes obstacles :

  • Frais de livraison élevés,
  • Restrictions sur les sites de e-commerce empêchant d’acheter au meilleur prix selon le pays.

Ainsi, de nombreux sites affichent des prix différents pour un même produit, selon l’origine géographique du client. Et bien souvent, il est impossible d’accéder aux offres les plus avantageuses.

Chez Zalando par exemple, une robe coûtera plus cher sur Zalando.fr et une autre sur Zalando.be. Cependant, impossible pour le consommateur d’acheter ses produits dans le pays européen où il est le moins cher.

Marc Tarabella

Un exemple frappant : cet été, Disneyland Paris a été pointé du doigt pour avoir proposé des tarifs plus attractifs aux Français et aux Belges, alors que les Allemands, les Espagnols ou les Italiens devaient payer beaucoup plus cher pour un même séjour.

CHAMBRE DISNEYLAND – WEEK-END 2 NUITS Prix Ecart en %
Famille française 🇫🇷 et belge 🇧🇪 865 € =
Famille allemande 🇩🇪 1272 € +32 %
Famille roumaine 🇷🇴 et danoise 🇩🇰 1204 € +29 %
Famille espagnole 🇪🇸 1114 € +23 %
Famille italienne 🇮🇹 1339 € +36 %
Source : Commission européenne, Prix moyen.

Vers un véritable marché numérique ?

Face à ces inégalités, Bruxelles s’active :

  • Des initiatives sont en cours pour réduire les coûts de livraison dans toute l’Europe.
  • La Commission européenne prépare des sanctions contre les pratiques de géo-blocage, qui empêchent l’accès libre aux meilleures offres.

À plus long terme, l’harmonisation de la fiscalité et des normes européennes reste un objectif clé pour parachever le marché unique.

Mais ce chantier, politiquement sensible, prendra sans doute plus de temps.


Reference